BARGONI

2014

…Il appartient à l’ultime génération des grands artistes de l’après-guerre qui créeront ce qui deviendra ce formidable essor international qui fut – et qui est encore! – l’Abstraction lyrique. Naturellement chacun conservant son tempérament, ses aspirations, son écriture et ses propres références culturelles.
… Chez Bargoni il y a une sorte de dramatisation élégante, par-delà d’une lumière intense. En y regardant bien on perçoit la joie expansive et communicative de couleurs forts qui ne manquent jamais de s’opposer à ces tensions sombres, ces jalons dramatiques, dont les tonalités sévères sont dues sans doute à une tendance au cosmique, pour nous assez saisissante. Somme toute, on peut voir toute au long de cette peinture informelle, perspicace les explosions d’un tempérament toute à la fois d’une certaine violence intérieure, peut-être, mais aussi un raffinement subtil qui vaut largement la peine que le spectateur s’y laisse séduire. 
… Son geste alors le conduit à une émotion qui se traduit par une matière épaisse traitée avec une générosité en larges coups de pinceau. Désormais, il brasse les couleurs avec une véhémence viscérale. Véhémence oui, mais secret aussi. … On le sait aujourd’hui, seuls ceux qui ont atteint les degrés les plus hauts du lyrisme ont perduré. Il ont su se détourner définitivement de toute appartenance à un avant-gardisme. Il restent loin de toute réminiscence, rejetant définitivement la figuration abstraite, chez d’autres défendue. Par ailleurs, la liberté du geste exclut naturellement l’automatisme. Ainsi les valeurs nouvelles de l’abstraction lyrique, en opposition à l’abstraction froide (géométrique), s’épanouissent dans d’autres hiérarchies. C’est tout cela que Giancarlo Bargoni assimile pour nourrir son oeuvre en devenir. 

BARGONI

Certes, il a compris depuis longtemps que ses premiers acquis et les valeurs esthétiques traditionnelles devaient être transgressées, puis même fondamentalement bouleversées. De cette constante effusion chromatique naît une flamboyance aux harmonies sensuelles qui touche… Les grands artistes de l’Abstraction lyrique, dans les années 1950/1960 sont finalement assez peu nombreux. Chacun le connaît. Comme toujours en cas de succès d’un nouveau courant, il y a eu beaucoup de suiveurs, beaucoup d’“abstraits” de la dernière heure, heureusement presque aussitôt disparus. Giancarlo Bargoni, lui, a su toujours maintenir un juste cap ne s’autorisant aucune faiblesse. Ce peintre, italien rappelons-le, a su s’enrichir culturellement des privilèges que son pays natal lui offrait.  Certes, il en a tiré les profits qui lui étaient nécessaires, mais sans excès, laissant la place à sa personnalité. Son art à la fois si spontané est parfaitement contrôlé, sans pour autant retenir le pinceau preste. L’agitation créatrice n’est pas précipitation. L’esprit toujours guide la main, l’écartant ainsi de tout danger de facilité. … La cohésion d’un esprit clair conduit la peinture de Bargoni dans un chemin pavé d’inquiétudes, de susceptibilités intérieures surmontées, de recherches englouties et d’élans vite rompus, rejetés. C’est de tout cela qu’est faite sa peinture. Outre un approfondissement permanent de sa vision, il pratique une remise en question permanente qui le conduit au succès. Bargoni est demeuré très conscient de tout cela, s’attachant à rester un aventurier solitaire dont l’instinct plastique est fort développé. Il est, assurément, un de rares artistes que Pierre Restany aurait pu appeler aussi un “peintre sensoriel de l’intuition”. (Patrick-Gilles Persin)

Giancarlo Bargoni / Brenda Bacigalupo